Reconnaissance, transcription et exécution des jugements étrangers - Avocat Versailles
Si votre jugement de divorce a été prononcé à l’étranger, alors il est important de vous assurer qu’il peut être reconnu et exécuté en France.
Les règles applicables à la reconnaissance et à l’exécution d’un jugement de divorce prononcé à l’étranger diffèrent selon que la décision a été rendue dans un État membre de l’Union Européenne ou dans un État tiers.
Premier cas : le jugement de divorce a été rendu dans un Etat tiers à l’Union Européenne
Dans cette hypothèse, la reconnaissance et l’exécution du jugement de divorce relèvent du droit international privé commun français.
Quelles sont les conditions pour que le jugement de divorce étranger soit reconnu en France ?
Une célèbre jurisprudence a posé, dès 1930, le principe selon lequel « les jugements rendus par un tribunal étranger relativement à l’état et à la capacité des personnes produisent leurs effets en France indépendamment de toute déclaration d’exequatur ».
Les jugements de divorce étrangers bénéficient donc d’une reconnaissance de plein droit en France, ce qui, concrètement, signifie que le jugement de divorce étranger passé en force de chose jugée :
- Fait obstacle à l’introduction d’une nouvelle demande en France
- Permet à l’époux divorcé de se remarier en France
- Peut être transcrit à l’État civil, sur instruction du procureur de la république, saisi d’une demande en ce sens par les parties (à l’exception toutefois des jugements de divorce prononcés au Maroc, qui devront préalablement faire l’objet d’une procédure d’exequatur).
Cette reconnaissance de plein droit suppose toutefois que le jugement de divorce étranger remplisse les conditions de régularité internationale posée par le droit français.
Ces conditions ont été posées par la jurisprudence et sont limitatives :
- Le jugement étranger doit avoir été rendu par un tribunal compétent
- Le jugement étranger ne doit pas porter atteinte à l’ordre public international français
- Le jugement étranger doit être exempt de fraude (est censurée tant la fraude à la loi que la fraude jugement).
Attention toutefois, la France peut avoir conclu avec certains pays étrangers des conventions bilatérales dans lesquelles les conditions requises pour que le jugement de divorce rendu dans ce pays étranger puisse être reconnu et
produire ses effets en France peuvent être différentes ; c’est le cas de la convention bilatérale conclue avec le Maroc par exemple.
Peut-on s’opposer à la reconnaissance en France d’un jugement de divorce étranger ?
Même si le jugement de divorce étranger bénéficie d’une reconnaissance de plein droit, il est toujours possible de contester sa régularité internationale et de demander au juge de la contrôler.
Ce contrôle peut être effectué à titre principal dans le cadre d’une action en inopposabilité ou en opposabilité du jugement étranger
L’action en inopposabilité consiste à saisir le juge afin de faire constater l’irrégularité internationale du jugement, au regard des conditions posées par la jurisprudence. Si l’inopposabilité est prononcée, alors le jugement de divorce étranger ne pourra produire aucun effet en France et toute demande d’exequatur de ce jugement sera déclarée irrecevable.
L’action en opposabilité consiste, à l’inverse, à saisir le juge afin de faire constater, indépendamment même d’une action en exequatur, la régularité internationale du jugement, de manière à ce que sa reconnaissance de plein droit ne puisse plus être contestée.
Mais le contrôle de la régularité internationale du jugement de divorce étranger peut également être effectué à titre incident, c’est-à-dire à l’occasion d’une autre action en justice.
Cela consiste donc pour l’une des parties à invoquer de façon incidente le jugement de divorce étranger pour faire obstacle à la demande de son adversaire en justifiant de sa qualité d’époux divorcé. Le jugement de divorce étranger peut, par exemple, être invoqué dans le cadre d’une action successorale, pour écarter une demande en contribution aux charges du mariage, ou encore pour s’opposer à une demande en divorce.
Lorsque le jugement de divorce étranger est invoqué à titre incident, le juge a alors l’obligation de se prononcer sur la régularité internationale de ce jugement.
Quelles sont les conditions d’exécution en France d’un jugement de divorce étranger ?
Pour pouvoir être exécuté en France, un jugement de divorce rendu à l’étranger doit être revêtu de l’exequatur. La procédure d’exequatur relève du Tribunal de Grande Instance.
Pour que l’exequatur soit octroyé, il faut non seulement que le jugement de divorce étranger remplisse les trois conditions de régularité internationale vues précédemment mais également que le jugement soit exécutoire dans le pays où il a été rendu.
Si la preuve de ces éléments est rapportée, alors l’exequatur sera accordé, sans que le juge ne puisse exercer un pouvoir de révision sur le jugement étranger. À défaut, le jugement ne sera pas susceptible d’exécution en France.
Deuxième cas : le jugement de divorce a été rendu dans un État membre de l’Union Européenne
La reconnaissance et l’exécution d’un jugement de divorce rendu dans un État membre de l’Union Européenne obéissent à des règles spéciales contenues dans les règlements européens dits Bruxelles II bis du 27 novembre 2003 et Obligations alimentaires du 18 juin 2011. Ces règles ont pour but de faciliter la reconnaissance et l’exécution des décisions entre les différents pays européens.
Il faut préciser que :
- Les règles contenues dans le règlement Bruxelles II bis ne s’appliqueront qu’à la reconnaissance du divorce en lui-même et des décisions prises en matière de responsabilité parentale;
- Les règles contenues dans le règlement Obligations alimentaires ne s’appliqueront qu’à la reconnaissance et à l’exécution des décisions concernant les pensions alimentaires ou les prestations compensatoires
;
- Pour ce qui est des effets du divorce sur le nom, le régime matrimonial, ou encore les éventuels dommages et intérêts, ce sont les règles du droit international privé commun de chaque État qui s’appliqueront.
Il existe donc une dissociation entre la reconnaissance du prononcé du divorce et la reconnaissance de ses conséquences, laquelle n’est pas sans engendrer d’importantes difficultés pratiques.
Quelles sont les conditions pour qu’une décision rendue dans un autre État membre soit exécutée en France ?
Les règlements Bruxelles II bis et Obligations alimentaires contiennent là encore des dispositions similaires.
Lorsqu’une décision statuant sur la responsabilité parentale et/ou sur les obligations alimentaires a été rendue dans un État membre, elle ne peut être exécutée dans un autre État membre qu’après y avoir été déclaré exécutoire.
La partie qui souhaite obtenir l’exécution de la décision en France doit donc au préalable présenter une demande de déclaration de constatation de la force exécutoire. Cette demande ne peut être rejetée que pour l’un des motifs de non reconnaissance de la décision prévus par chacun des règlements.
Toutefois, si la décision statuant sur les obligations alimentaires a été rendue dans un État membre lié par le protocole de La Haye, alors cette décision bénéficie de la force exécutoire dans les autres Etats membres sans qu’aucune déclaration constatant cette force exécutoire ne soit nécessaire. La décision peut donc être exécutée en France sans qu’il soit nécessaire de recourir à une procédure préalable.
Le règlement prévoit toutefois la possibilité pour le débiteur d’invoquer des motifs de refus ou de suspension de l’exécution de la décision.
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